Maurice Chevit vient de quitter la scène. La mort de ce second rôle, qui en valait bien des premiers, m'a fait penser à la première découverte que j'ai faite de cet acteur. Ce n'était pas la prestation dans les bronzés font du ski,mais à la télé, beaucoup plus tôt, en 1963, dans une "dramatique" mise en scène par Stellio Lorenzi : La charrue et les étoiles, pièce de l'irlandais Sean O'Casey. Je l'ai toujours en mémoire.
C'est pour moi l'occasion de parler de l'influence que la télévision a eue sur mes envies de spectacles.
C'était à l'époque où il y avait des gens de talent, pas d'audimat, une seule chaîne en noir et blanc et où les dramatiques étaient réalisées en quasi direct, performance pour les acteurs et les réalisateurs qui avaient plus de génie que de moyens.
Certains d'entre vous ont peut être connu cette époque merveilleuse : quelques titres : Les perses d'Eschyle, Le Don Juan, tourné aux salines royales d'Arc et Senans avec Michel Piccoli, le Tartuffe avec Michel Auclair etc..etc..
Mon premier choc date du 25 décembre 1962, nous avions la télé depuis un ou deux mois et devant mes yeux ébahis d'adolescent j'assistais à mon premier "Shakespeare" : La Nuit des Rois.
Pendant plus de deux heures je restait scotché à l'écran découvrant des ejux de comédiens subtils et complètement inconnus pour moi : François Chaumette, Jacques Fabbri, Robert Hirsch, Catherine Samie, Martrine Sarcey, et surtout Jean Rochefort, Jean-Pierre Marielle et la sublime Geneviève Page dans un rôle androgyne qui me fascina.
Le réalisateur était Claude Barma, dont je ne manquais après aucune prestation, notamment le Chevalier de Maison Rouge avec Dominique Paturel que nous avions découvert à Radio Alger où il effectuait son service militaire avant l'indépendance.
Autre choc "shakespearien" : La mégere apprivoisée de Pierre Badel, avec Rosy Varte (madame Badel, récemment disparue) et le regretté Bernard Noël. Nous avons essayé au groupe théâtral du Lycée Berthollet de monter cette pièce, mais en vain : pas de vraie Catarina et je faisais un Pettruchio médiocre.
Alors messieurs Barma, Lorenzi, Badel et autre Bluwal, merci d'avoir donné à un gamin l'envie de faire du théâtre. Je mesure la chance de cette qualité de spectacles que je n'ai jamais retrouvée à l'écran.
A vous Cognacq Jay... Avec le complice de Claude Barma : Antoine Duhamel.